De la belle chaire à la bonne chère
Avant d’être une adresse de renom pour les gastronomes, le restaurant Athénée Quatre était une ancienne chapelle située au sous-sol d’un immeuble cossu du 19ème siècle dans la vieille ville de Genève. Explication d’une métamorphose qui a su conserver l’aura des lieux.
À quelques pas du charmant quartier de la ville haute de Genève, le bas de la rue de l’Athénée est particulièrement riche en bâtiments de grande qualité : l’ensemble classique de la rue Beauregard, le Palais de l’Athénée néo-renaissance, les deux hôtels particuliers des familles Paccard et Ador. En dépit d’une allure moins spectaculaire, l’Athénée4 présente sur le plan historique et architectural un intérêt comparable. Et son histoire ne l’est pas moins. Débutée au milieu du 19ème siècle, elle a vu, de 1865 à 1920, la bâtisse accueillir une école religieuse et sa vaste chapelle, aussi appelée temple dans la religion protestante.
En 1999, Helena Mach, propriétaire des lieux, lui a redonné vie en la transformant en un espace pluriculturel. Les architectes Janos Farago et Albéric Hopf ont alors entrepris d’adapter la salle à sa nouvelle vocation tout en préservant au maximum la substance d’origine : respect du volume et de son éclairage, maintien de la galerie circulaire et du parquet, dépouillement général. Les efforts ont porté principalement sur l’amélioration des circulations. Un accès indépendant depuis le jardinet a ainsi créé, tandis qu’à l’intérieur, un escalier en acier et en bois en forme de S a relié la galerie à l’ancienne nef. L’Athénée4 a ouvert ses portes en 2000, devenant un restaurant le midi, une galerie d’art l’après-midi et, occasionnellement, une salle de concerts de jazz en soirée, le lieu s’adaptant à chaque activité dans sa configuration spatiale, comme dans la diffusion de la lumière ou de l’acoustique.
Nous y avons rencontré son fils Sébastien qui gère l’établissement depuis quelques années et y a entrepris à nouveau des travaux importants pendant 8 mois en 2016. Un beau bar en laiton et marbre, ainsi qu’un mur végétal de bel effet ont été installés. Les luminaires ont été remplacés qui, descendant du plafond telle une gerbe inversée, donnent un aspect contemporain immédiatement visible dès l’entrée située en mezzanine. Fourni par l’association genevoise Knock on Wood passionnée du travail du bois, le mobilier est entièrement modulable, permettant de s’adapter aux diverses configurations d’usage de l’établissement (le restaurant pouvant accueillir de 50 à 80 couverts, voire 150 en cocktail dinatoire). Il y participe même en se transformant en petite scène sur laquelle se produisent les musiciens.
Bistronomie, kokedama et hausse du panier moyen
Encore une fois, ces travaux de rénovation ont été réalisés dans le respect de l’identité historique des lieux, marquée notamment par des superbes colonnes de style corinthien grec, tout leur imprimant une évolution en phase avec leur temps. « Nous avons conservé ce qui faisait l’âme et le cachet de l’Athénée4, tout en les “décalvinisant”, c’est-à-dire en lui enlevant une part de son austérité et de sa froideur. C’est pourquoi nous avons, par exemple, remplacé la peinture des murs et plafond blanc crème par une couleur bleu paon. »
Opérées sous l’égide de l’architecte d’intérieur Nicolas Perrotet, ces transformations ont généré un rajeunissement de la clientèle, sans toutefois abaisser son statut socio-économique ni son panier moyen. Celui-ci a même progressé, en raison de la mise en œuvre d’une carte bistronomique à base de produits locaux pour les gourmets. « Notre ambition était de passer d’un lieu sacré au sens religieux à un lieu sacré dévolu à la nature. Outre ce qu’on trouve dans nos assiettes, nous avons mis en place le mur végétal, mais aussi diverses touches florales et botaniques, telles que les kokedama, petites plantes exotiques en décorations de table. »
Jérôme Alberola
Galerie photos
Partager cet article